Actualités

mer., 29 juil. 2015 09:27:00 +0000

La nullité de la cession d'une société comme sanction du non-respect de l'obligation d'information des salariés est déclarée inconstitutionnelle.

Le Conseil constitutionnel a déclaré inconstitutionnelles les dispositions issues de la loi n° 2014-856 sur l'économie sociale et solidaire (ESS), dite « loi Hamon », qui permettaient à tout salarié d'annuler la cession d'une société dès lors que l'obligation d'information de l'ensemble des salariés d'une entreprise de moins de 250 salariés était méconnue.

Le 22 mai 2015, par sa décision n°386792, le Conseil d'État a renvoyé une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) au Conseil constitutionnel afin de vérifier la conformité de la « loi  Hamon » du 31 juillet 2014 aux droits et libertés garantis par la Constitution.

Il était demandé au Conseil constitutionnel d'établir, d'une part, si l'obligation d'informer tous les salariés préalablement à la cession d'une participation majoritaire dans une société de moins de 250 salariés porte ou non une atteinte excessive à la liberté d'entreprendre et au droit de propriété du cédant ; et d'autre part si sanctionner la méconnaissance de cette obligation par la nullité de la cession respecte la liberté d'entreprendre et le droit de propriété du cédant.

Concernant d'abord l'obligation d'information des salariés, le Conseil constitutionnel considère que cette mesure s'inscrit dans la poursuite de l'intérêt général en favorisant la reprise des entreprises et leur poursuite d'activité. Par conséquent, l'atteinte à la liberté d'entreprendre n'est pas manifestement disproportionnée au regard de cet objectif. De plus, le cédant restant libre de céder sa participation dans la société à l'acquéreur et dans les conditions de son choix, son droit de propriété reste protégé. Ainsi, l'obligation d'information des salariés est déclarée conforme à la Constitution.

Concernant ensuite l'annulation, par un salarié, de la cession intervenue en méconnaissance de l'obligation d'information des salariés, celle-ci ne respecte pas la liberté d'entreprendre du cédant. En effet, l'objectif de cette disposition est de permettre aux salariés de présenter une offre de reprise, sans pour autant lier le cédant ; or tant que le cédant n'a pas publié la cession, tout salarié pourrait faire annuler ce contrat. Cette sanction est dès lors déclarée inconstitutionnelle.

Par sa décision n° 2015-476 QPC du 17 juillet 2015, le Conseil constitutionnel valide  donc l'obligation d'information des salariés mais déclare inconstitutionnelle l'action en nullité de la cession pour méconnaissance de l'obligation précitée. Cette décision est entrée en vigueur dès le 19 juillet 2015, date de la publication de ladite décision au Journal officiel.

Nous pouvons relever que le législateur a déjà prévu de se mettre en conformité avec la décision du Conseil constitutionnel en modifiant la sanction prévue en cas de manquement à l'obligation d'information des salariés.

En effet, l'idée de remplacer la sanction de la nullité par une amende proportionnelle au prix de vente a été envisagée dès le mois de mars 2015 dans le Rapport d'évaluation du droit d'information préalable des salariés en cas de cession de leur entreprise, dit « Rapport Dombre-Coste » du 18 mars 2015. Cette proposition concerne autant les cessions de sociétés que de fonds de commerce.

Cette mesure est prévue à l'article 204, 8° de la loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, dite « loi Macron », adoptée définitivement  le 10 juillet 2015 et intégrée à l'article L. 23-10-7 du code de commerce . Il est précisé que le montant de l'amende, qui se substitue à la sanction de la nullité, ne peut pas excéder 2% du montant de la vente.

La constitutionnalité de cette disposition n'a pas été contestée devant le Conseil constitutionnel. Le Conseil constitutionnel ayant validé la majorité des dispositions de cette loi par sa décision n° 2015-715 DC du 5 août 2015, la « loi Macron » entre donc définitivement en vigueur.